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Un coup d’Etat au pays des Hommes intègres



Le 24 janvier, alors que le président Roch Kaboré était arrêté et contraint à présenter sa démission, le lieutenant-colonel Paul-Henri Sandaogo Damiba a annoncé prendre la tête du pays. Il a décidé de la fermeture des frontières pour une durée indéterminée et d’un couvre-feu de 21h à 5h du matin. Le gouvernement et l’Assemblée Nationale sont dissous et la Constitution suspendue pour un « délai raisonnable ».


Ce coup fait suite à une mutinerie dans certaines casernes militaires de Ouagadougou les jours précédents. En effet, des soldats se sont rebellés pour réclamer le départ des décideurs politiques et des moyens plus adaptés à la lutte contre les djihadistes.


En réalité, la chute du gouvernement burkinabé s’inscrit dans une suite d’événements qui ont fragilisé sa légitimité aux yeux des citoyens et qui ont renforcé les velléités des putschistes.


Alors que le président Kaboré avait promis de venir à bout du fléau du terrorisme (particulièrement dans le nord du pays) lors de son élection en 2015, il s’est vite retrouvé impuissant face à une situation qui n’a eu de cesse de s’empirer. Les terroristes affluent depuis le Mali voisin du fait du manque de contrôle à la frontière dans le Sahel. Ces derniers peuvent organiser des attaques et dicter leur loi en toute impunité, le Burkina Faso n’ayant pas les moyens de rétablir la paix dans cette zone.


La situation s’est aggravée avec la décision d’Emmanuel Macron de retirer la force militaire Barkhane. Elle avait été mise en place en 2014 pour former les soldats du G5 Sahel, apporter le matériel et organiser des actions contre les cellules terroristes de la région, Al-Qaïda en premier lieu.


L’un des drames les plus terribles a été le meurtre de 49 gendarmes, probablement par des djihadistes, en novembre 2021. Ce fut l’élément déclencheur de nombreuses manifestations contre l’incapacité de l’Etat burkinabé à combattre la violence là où elle se trouve. Les militaires ont aussi montré leur désaccord avec la politique du gouvernement, l’accusant de ne pas assez soutenir l’armée.


Alors que durant l’année passée le Mali et la Guinée ont aussi été victimes de coup d’Etat, la Communauté Economique des Etats d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) peine à agir concrètement et se limite à dénoncer ces menaces pour les régimes démocratiques de la région. Tout ceci est d’autant plus inquiétant que les présidents guinéens, maliens et burkinabés ont tous été élus de manière démocratique et avec le soutien de la population.


Si toutefois, les burkinabés semblent, pour l’instant, soutenir l’initiative de Paul-Henri Sandaogo Damiba, la situation pourrait rapidement se retourner contre lui si les mesures prises s’étalent dans le temps.



Point sur Roch Marc Christian Kaboré :


Le président burkinabè déchu est un membre du Mouvement du Peuple pour le Progrès. L’économiste, Premier Ministre du Burkina Faso de 1994 à 1996, est aussi passé par le poste de président de l’Assemblée Nationale pendant dix ans avant de se présenter, avec succès, aux élections présidentielles en 2015. Il succède au président autoritaire Blaise Compaoré, déchu par le peuple après avoir dirigé le pays de 1987 à 2014. M. Kaboré gagne sur la promesse de rétablir l’autorité de l’Etat, face aux terroristes mais aussi par rapport à la corruption, et veut œuvrer à la reprise de l’économie du pays.

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